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Essai moto Morbidelli 850 V8
5 participants
Page 1 sur 1
Essai moto Morbidelli 850 V8
Et m... Ratu, mais de peu
par David Morcrette | 16.04.2020
Essai moto Morbidelli 850 V8
Ce qui aurait pu être le huit ultime
V8 à 90° longitudinal, 847 cm3, 120 ch et 80 Nm, 200 kg à sec, suspensions CGB-Paioli, freins Brembo, cadre Bimota..
.
Demandez à n'importe quel fana de technique moto sa top liste des motos les plus exotiques jamais construites et elle contiendra surement la sportive Moto Guzzi V8 500GP des années 1950 et peut-être aussi la Honda V4 NR500/750 à piston ovale des années 1980. Il s'agissait d'un V8 déguisé sous un autre nom avec ses 32 soupapes et ses huit bielles incarnant le talent japonais pour les idées originales. Mais il y a une autre moto multi-cylindres à ajouter à cette check-list : la Morbidelli 850 V8. Et avec huit cylindres dans une moto, on entre clairement dans une autre dimension. De quoi faire de cette Morbidelli V8 une moto d'exception qui mérite de rentrer dans le club très restreint des motos les plus exotiques ayant jamais été construites.
Cette Morbidelli est d'autant plus exceptionnelle qu'elle était sur le point d'entrer en production en 1998, après une décennie de travail... avant d'être annulée. Il n'y aura eu finalement que trois machines de produites ! Ce qui ajoute encore plus à sa rareté.
Lors d'une de mes visites à Pesaro pour la découvrir, son créateur, feu Giancarlo Morbidelli, m'a expliqué comment cette moto de route à 8 cylindres portant son nom a vu le jour avant de mourir aussitôt après sa naissance.
Essai de la Morbidelli 850 V8
Découverte
Giancarlo Morbidelli :
"Ma femme a insisté pour que nous partions en vacances pendant un mois quelque part en Afrique où il y avait beaucoup de soleil, mais rien à faire. Je m'ennuyais vraiment, alors pour passer le temps, j'ai décidé de concevoir ma propre moto multi-cylindres ! A l'origine, je voulais faire un V12, mais j'ai finalement choisi un V8 parce que ce serait plus pratique pour une moto de tourisme, ce que je voulais créer. C'était juste une idée pour tuer le temps, mais après mon retour de vacances, j'ai décidé de construire un prototype pour faire connaitre l'expertise technique de notre entreprise de machinerie, qui est ainsi devenue le bénéficiaire effectif des droits sur la conception. De là à la production limitée et à la main pour des clients qui, comme moi, sont des passionnés d'ingénierie fine, n'a été qu'une courte étape, même s'il a fallu plusieurs années pour être prêt pour la production.
Mais juste au moment où elle est arrivée en 1997, j'ai pris ma retraite du secteur et j'ai vendu mon entreprise. Malheureusement, la direction de l'entreprise qui l'a achetée a décidé qu'elle ne voulait pas être un fabricant de moto et a arrêté la production de V8 avant qu'elle ne débute vraiment. Nos trois premières motos étaient sur la chaîne de production, avec deux moteurs supplémentaires partiellement terminés et la chose la plus frustrante est que nous avions fait 95% du développement pour être prêt pour la production et 75% du travail nécessaire à l'homologation en Europe, notamment au Royaume-Uni et en Allemagne, les pays où nous avions reçu le plus de commandes. J'ai donc cherché un partenaire pour reprendre le projet et le mettre en production parce je n'aime pas la défaite et ce V8 était trop près de mon coeur pour le laisser partir sans combat ! Mais personne ne s'est manifesté, nous avons donc dû abandonner complètement le projet. Ce fut la plus grande déception de toutes mes années dans la moto."
Giancarlo Morbidelli et sa 850 V8 en 1998
Compte tenu de l'héritage en compétition de Morbidelli, vous auriez naturellement pu supposer que la première moto de route à en porter le nom serait une sportive exclusive, une sorte de Lamborghini ou Ferrari sur deux roues. Rien de tel, car Giancarlo Morbidelli était tout sauf prévisible.
"Mes jours années de compétition étaient terminées et je voulais créer une moto de tourisme tout à fait unique, mais avec un touche sportive, pleine d'innovation technique et de solution d'ingénierie de haute technologie, construite en utilisant les meilleurs composants et fournisseurs possibles. Fondamentalement, je voulait construire la meilleure moto de route au monde pour une utilisation rationnelle, que le propriétaire puisse apprécier sans avoir l'impression doit être un pilote expert. D'où ma décision de limiter la capacité à 850 cm3 et la puissance à 120 chevaux. Mais après que Weber Marelli ait accepté de concevoir et de fabriquer un système d'injection miniature spécial pour la moto et que nous avons copié la disposition que j'avais vue sur les moteurs de Formule 1 de mon fils Gianni chez Ferrari et Arrows en remplaçant les papillons des gaz par des barillets rotatifs qui améliorent le débit et raccourcissent la longueur de l'admission, nous avons récolté 20 ch supplémentaires sans la moindre modification !
Puisque nous avons obtenu ça sans rien en termes de développement, j'ai décidé de les conserver de sorte que les motos de production auraient été limitées électroniquement à 11.000 tr/min, moment auquel 120 ch sont délivrés à la roue arrière. Le régime maximal sûr ? Nous n'avons jamais fait tourner le moteur sur un échappement ouvert, avec le système de gestion correctement cartographié et sans rupteur, mais je suppose qu'il est de 16.000 tr/min au moins et dépasse largement les 180 ch. Cela aurait été amusant d'essayer d'obtenir des performances ultimes, mais à la fin, sous l'appellation tourisme, la moto dépassait déjà les 240 km/h, j'étais donc satisfait du résultat."
La Morbidelli 850 V8
A son retour de la plage avec l'idée générale en tête et gribouillée au dos de divers articles de papeterie d'hôtel, Morbidelli a confié la conception du moteur V8 à Giorgio Valentini, qui en plus de Moto Guzzi et Cagiva avait également travaillé pour Porsche, Alfa Romeo et Abarth.
"Je voulais que le moteur soit un moteur de type automobile, un mini Cosworth V8. Il était donc logique d'employer une personne ayant l'expérience de l'automobile et qui était intéressée pour appliquer ça aux motos."
Le résultat ne peut être comparé sur deux roues qu'à la Guzzi V8 et seulement de manière ténue car cette moto avait son moteur situé en travers du cadre avec une transmission par engrenage vers les arbres à cames, des carburateurs et une transmission finale par chaîne, tandis que le moteur Morbidelli était lui installé dans la longueur du cadre tubulaire en acier conçu par Bimota et comprenait une transmission à engrenage et courroie, une injection Weber Marelli, une boite 5 rapports et une transmission finale par arbre.
"Dès le départ, je voulais que le moteur soit positionné dans le sens de la longueur du cadre. Je pensais juste que ça irait mieux et que l'on pourrait apprécier son design correctement. En fait, le moteur est 50 mm plus court que celui d'une BMW K100 grâce à la disposition des cylindres décalés sur chaque rangée, donc il n'a pas compromis les dimensions du châssis et bien sûr, cela a rendu la moto beaucoup plus fine et agile."
Le cadre tubulaire de la V8 a été conçu par Bimota
Comme le Cosworth DFV, le moteur Morbidelli à refroidissement liquide est un V8 à 90° avec quatre arbres à cames et 32 soupapes. Mais il faudrait même parler d'une réplique à plus petite échelle du légendaire moteur F1 mesurant 55 x 44,5 mm pour une cylindrée de 847 cm3 et installé sous le pilote plutôt que derrière lui !
Le vilebrequin plat comporte ici cinq roulement principaux avec des arbres calés à 180°, faisant fonctionner le moteur comme un double quatre cylindres en ligne. Ceci améliore l'échappement des gaz et délivre une note distinctive qui, à bas régime, est finalement assez silencieuse. Des engrenages cylindriques s'échappant du vilebrequin entraînent une paire de poulies à l'avant du carter en aluminium, qui à leur tour fournissent une transmission par courroie crantée aux deux arbres à cames en tête par rangée de cylindres. Les quatre soupapes par cylindre sont réglées à un angle total de 28° comme sur le Cosworth, l'injection multipoint Weber-Marelli étant placée au sommet du moteur entre les cylindres du V, alimentant ces derniers via les étranglements du barillet rotatif tournant dans de minuscules corps de papillon de 25 mm. La puissance de pointe a été limitée électroniquement à 120 ch à 11.000 tr/min avec un couple maximal de 80,42 Nm à 9.500 tr/min.
La conception du V8 s'inspire de celle des moteurs de F1
Un simple radiateur à eau est installé au-dessus du moteur, plutôt que devant, afin d'exposer au maximum ce moteur indéniablement beau et étonnamment compact.
De nombreuses motos à quatre cylindres ont l'air plus encombrantes. Il est impressionnant de voir la compacité de celui-ci en comparaison. Pourtant ce moteur V8 repose sur pas moins de 1100 pièces pour un poids final de 70 kg à lui tout seul.
Une boîte de vitesse à 5 rapports est boulonnée à l'arrière des carters en aluminium, avec un embrayage double disque (155 mm) à sec à membrane métallique et commande hydraulique avec une transmission finale par arbre, confirmant les aspirations touring du V8 850. Le système d'échappement repose sur un design 8-en-1 qui aurait également pu être équipé d'un triple pot catalytique, si les clients l'avaient souhaité ou en avaient eu besoin.
Le silencieux de la Morbidelli 850 V8
Le moteur est utilisé comme élément semi-porteur du châssis, suspendu à un cadre périmétrique tubulaire en acier CrMo conçu par Bimota à partir de tubes de 32 mm épais de 2 mm et soudés par TIG. A l'avant se trouve une fourche télescopique inversée GCB-Paioli de 46 mm entièrement réglable offrant un débattement de 120 mm de la roue et réglée sur une ouverture de 25° avec une chasse de 98 mm. Le bras oscillant unilatéral en fonte d'aluminium abrite l'entraînement final de l'arbre et délivre un débattement de 110 mm avec son amortisseur GCB-Paioli entièrement réglable lui aussi. Le pack de freins Brembo comprend deux disques flottants avant de 320 mm saisis par des étriers quatre pistons (non radiaux, car cela n'existait pas), avec un grand disque fixe arrière de 285 mm dont la taille a été nécessaire en raison du diamètre du moyeu d'entraînement final autour duquel il vient se placer. Celui-ci est freiné par un étrier à deux pistons.
Et au final, la moto ne pèse que 200 kg à sec ! Un poids et une réalisation remarquable compte tenu de la complexité et de l'encombrement global, notamment par rapport à bon nombre de quatre cylindres pesant plus lourd.
Trois exemplaires ont été assemblés avant la fermeture de l'usine
Et pourtant, ce chef-d'oeuvre technique a reçu un accueil mitigé lors de ses débuts publics en 1994. Lorsque la "moto la plus chère du monde" a été dévoilée sur la scène mondiale, c'était un peu comme voir une princesse déguisée en grenouille. Pour favoriser la connexion automobile du moteur de type Cosworth, Giancarlo avait commis l'erreur fatale d'inviter la légendaire maison de design sur quatre roues Pininfarina pour styliser sa toute première moto autour du moteur V8 de Morbidelli et le résultat aurait sûrement pu être amélioré par n'importe quel adolescent rêveur qui gribouille sur ses cahiers.
Les phares à yeux de grenouille ne sont que l'aspect le plus distinctif d'un ensemble défectueux qui a suscité un mépris universel, ce qui a incité Giancarlo à mettre ce design à la poubelle et à recommencer, en chargeant Bimota de concevoir un nouveau châssis pour la moto, équipé d'un style beaucoup plus sobre. Cela a flirté avec une retenue excessive au point de frôler l'anonymat, mais n'a pas nuit à la beauté du moteur lui-même. Sous cette apparence, le prototype a parcouru plus de 5.000 km entre les mains du testeur de Bimota Gianluca Galasso, alors que le moteur avait fonctionné pendant 100 heures sur le banc d'essai.
Et pourtant, Morbidelli m'a confié que sous cette forme finale, son carnet de commande était plein pour cette moto tarifée à 80 millions de lires (environ 27.000 €) à l'époque.
Le premier prototype fut designé par Pininfarina, sans succès...
Au lieu de ça, l'une des motos quasi terminée est allée au Barber Museum d'Alabama. Giancarlo et George Barber avaient en effet noué une étroite amitié à Daytona où les plats de pâtes cuisinés par Morbidelli alimentaient l'équipe Barber dans leur quête de victoire. Ce fut la seule moto complète exposée au Museo Morbidelli de Pesaro. Fort heureusement, Giancarlo conserva le troisième exemplaire pour que lui ou un ami puisse l'emmener faire un tour le long des lacets de la Strada Panoramica en direction du nord jusqu'à Cattolica sur la côte adriatique, histoire de se rappeler ce qui aurait pu être...
En selle
J'ai eu l'honneur d'être le seul journaliste à avoir jamais roulé sur la Morbidelli 850 V8 et cela m'a fait me souvenir de la seule et unique fois où je me suis assis au volant d'une Ferrari V12 (une vrai, quoi!). Cela impliquait un mélange homogène de respect et d'admiration, de nervosité et d'anticipation, le tout mélangé à l'impatience d'entendre chanter le moteur et de connaitre la sensation unique de conduire un tel engin. Eh bien, tout ce que je peux dire, c'est que la Morbidelli V8 a complètement répondu à mes attentes. La seule chose sur deux roues à laquelle je pourrais la comparer est la Honda NR750, mais ce n'était pas italien mais japonais et pas un vrai V8. Parce que la Morbidelli est aussi italienne que manger des pâtes asciutta arrosées d'une bouteille de Sangiovese. C'est authentique.
Le second design s'est montré beaucoup plus classique, à la limite de l'anonyme
Cependant, tout n'était pas comme il le semble. La position de conduite de la moto est très teutonique. On pourrait même penser que c'est une BMW si on la conduisait les yeux bandés. Elle offre en effet une position assez droite mais confortable et une assise étroite et relativement basse, au guidon plat, qui rappelle un certain nombre de sport-GT bavaroises. Et puis il y a vraiment beaucoup d'espace pour les jambes.
A ce moment là, je me suis souvenu que ce châssis avait été conçu par Pierluigi Marconi de Bimota, l'ingénieur en chef de la marque de l'époque. Lorsqu'il a créé ce cadre pour la V8, Marconi travaillait en parallèle sur une autre Sport Tourer Bimota à entraînement par arbres, mais cette fois pour BMW et qui elle a été produite sous le nom de K1200RS ! Bien que les deux cadres soient évidemment aussi différents que les moteurs qu'ils abritent, il n'y a aucun doute sur la filiation lorsque l'on prend place sur la V8.
Les freins avant Brembo de la Morbidelli 850 V8
Pourtant, malgré la position de conduite spacieuse, les repose-pieds ne sont pas trop bas pour aller frotter trop facilement dans les courbes, en particulier avec les limites d'inclinaisons du pneu arrière, très étroit, de 160 et 18 pouces monté sur une maigre jante de 4,50 pouces. C'est le seul rappel évident des sept années de développement de la Morbidelli. Car en 1990, quand le développement de la moto a commencé, cette taille de pneu était alors considérée comme charnue. Cela a bien évolué depuis !
Le démarreur et le moteur V8 s'allument rapidement et ce dernier s'installe sur ce qui semble un ralenti rapide mais qui, en plissant les yeux au centre de l'écran LCD, s'avère n'être qu'à 700 tr/min. Ce tableau de bord avant-gardiste installé par Bimota est bien en théorie, mais catastrophique dans la pratique, en étant tout simplement illisible en plein soleil. Un comble pour une moto italienne née dans la région de Pesaro ! De mes jours à piloter les Bimota Tesi pour l'usine, je me souviens de la fréquence des défauts du compteur LCD pour cette même raison. Le tableau de bord de la V8 ne fait pas mieux. Et pourtant, il intègre nombre de données utiles. Et il offre une belle disposition, avec une bande supérieur pour surveiller le régime, avec le rapport sélectionné affiché dans le coin inférieur gauche, le compteur de vitesse au centre et la température de l'huile/eau sur le côté droit.
Le compteur de la V8 est tout simplement illisible au soleil
Les rétroviseurs réglables électriquement abritent également les clignotants. Et la bonne idée, c'est qu'ils peuvent être tournés manuellement pour offrir plus d'appui frontal à des vitesses élevées. En parlant au pilote d'essai Gianluca Galasso, il semble que l'avant de la V8 avait tendance à s'alléger à partir de 220 km/h de sorte que lorsque l'on passait sur une bosse, le guidon commençait à osciller sérieusement entre les mains (pour ne pas dire guidonner sérieusement), un problème que la rotation des rétroviseurs à partiellement résolu !
Le trafic de vacances sur l'autoroute d'Ancône ne m'a pas permis de rouler aussi rapidement durant mes six heures à son bord. Je ne peux donc pas dire que j'ai vécu ce qui doit être une expérience mémorable. Mais il semble que l'adaptation de pneus modernes radiaux Pirelli plutôt que les anciens Dragon que portent la moto auraient pu résoudre ce problème de stabilité comme c'est le cas sur d'autres modèles. En tout cas, la Morbidelli gagnerait à recevoir un bon pneu arrière de 180/190 sur une jante de 17 pouce même si cela signifierait une refonte du bras oscillant.
Essai
Le petit et léger vilebrequin signifie que le moteur V8 monte en régime très facilement depuis les bas régimes avec une accélération légère et précise qui, selon Morbidelli, est un gain du matériel d'admission dérivé de la F1. L'embrayage hydraulique est également facile à utiliser et précis. Celui-ci peut-être utilisé très précisément lorsque l'on doit réaliser un demi-tour par exemple. Le rayon de braquage est d'ailleurs étonnamment bon pour une machine à l'empattement de 1.460 mm. Mais c'est l'accélérateur que l'on apprécie le plus car c'est la clé de ce qu'était alors le meilleur moteur de moto que l'homme ait fait monter sur une moto. A tel point que l'on aurait pu sérieusement envisager de piloter sans casque, juste pour profiter du concert profond du système audio du huit cylindres. Faites passer le V8 au dessus des 4.000 tours et préparez-vous à la tonalité glorieuse du silencieux Termignogni, bien que Giancarlo le trouvait "pas assez fort". Il avait prévu d'offrir à ses clients un silencieux de piste en titane, pour la piste uniquement, qui aurait chanté comme un soprano plutôt qu'un rossignol. Mais c'est censé être une moto de touring, rappelez-vous !
Essai de la Morbidelli 850 V8 sur route
Eh bien, OK ! Mais alors que la puissance douce et lisse du ralenti jusqu'au rupteur à 11.000 tr/min donne raison à la description de son créateur comme "un moteur électrique avec un haut-parleur attaché jouant une mélodie de moto ", le fait est que le hurlement musculaire du V8 à 32 soupapes se durcit lorsque le compte-tours atteint les 7.000 tours, changeant de hauteur en un cri puissant qui donne la chair de poule. C'est une moto pour ravir les sens, pas seulement à regarder ou à rouler, mais aussi à écouter. C'est unique, génial, fabuleux, passionnant, tous les superlatifs s'appliquent.
La position de conduite est très proche de celle des tourers BMW
Elle est également assez puissante, avec un appétit pour les régimes qui donne envie de la nourrir de la main droite, jusqu'à ce que le rupteur s'actionne et vous envoie quelques octaves plus bas sur l'échelle de régime. Avec un couple de pointe de 80,42 Nm à 9.500 tr/min, ça paie de pousser le moteur jusque là. Cela signifie que pour tirer pleinement parti des accélérations, il est préférable d'utiliser la boîte à cinq rapports pour découvrir des plaisirs insoupçonnés. C'est en quelque sorte la meilleure moto à transmission par arbre que j'avais jamais piloté en 1998, si facile, précise et surtout silencieuse dans des changements de rapport. C'est vraiment très lisse, un fait rendu possible grâce aux disques d'embrayage de plus petit diamètre utilisés dans la transmission tandis que les modèles comme Guzzi et BMW utilisent des plaques beaucoup plus grandes avec plus d'inertie. Peut-être, mais quoiqu'il en soit la courbe de puissance du V8 et sa courbe de couple très lisse permettent de passer à la vitesse supérieure à tout moment si on le souhaite, enfin jusqu'à ce que l'on sente que le moment est venu de commencer à jouer avec la boîte et de faire de la musique. Mais aussi de se déplacer un peu plus rapidement...
Le moteur délivre 120 ch et 80 Nm de couple
Pourtant, aussi haut que l'on fasse tourner le V8 au repos sur la béquille centrale (heureusement très solide et facilement utilisable), il n'y a aucun vibration à aucun régime. Je pourrait mettre une pièce à plat sur le réservoir ou un verre d'eau que ni l'un ni l'autre ne se renverserait avec le moteur en marche.
Même chose lorsque l'on est assis sur la moto. Il n'y a pas de poids d'équilibrage aux extrémités du guidon qui ne porte que de fines poignées en caoutchouc et pas de caoutchouc sur les repose-pieds non plus, ce qui fait se sentir encore plus proche de la moto, en contrôle plus direct que si on avait des poignées en mousse épaisse et des repose-pieds caoutchoutés pour aplanir les vibrations.
Je n'ai pas ressenti la moindre vibration lors de l'essai de la Morbidelli, juste une sorte d'impression de mouvement mécanique lorsque l'on tord le poignet droit, ce qui en fait une moto infatigable et étonnamment relaxante pour rouler longtemps et fort, enfin, une fois que l'on a réussi à oublier son prix ! Et on ne ressent jamais non plus l'effet gyroscopique du mouvement longitudinal, ce qui témoigne de la réduction de l'inertie du moteur.
Avec son centre de gravité bas, la moto reste parfaitement maniable
Le positionnement du moteur dans le sens de la longueur peut avoir été choisi pour des raisons esthétiques, mais il a certainement offert un bonus en termes de maniabilité en abaissant le centre de gravité. Le V8 aurait dû s'asseoir plus haut dans le cadre s'il avait été placé en travers, pour offrir une garde au sol suffisante, mais sa position surbaissée donne non seulement une sensation plus équilibrée à la moto, mais aide également à la prise de virages rapides, stables et sûrs, éliminant les bosses qu'il croise sur son chemin au mieux avec cet amortisseur arrière dur comme du béton. Pourtant, elle se montre étonnamment douce dans les virages serrés pour une moto si longue, résultat de la combinaison du poids bas et de la géométrie de la direction (25°, 98 mm). Cela élimine non seulement le besoin d'un amortisseur de direction, mais fournit également une sensation bien équilibrée qui rend la Morbidelli plus légère et plus agile qu'on ne le pense. Elle se couche si facilement dans les virage le long de la Strada Panoramico que je peux rouler un peu plus fort que ce à quoi je m'attendais sur une moto V8, avec relativement peu d'effort.
Point noir de la moto, l'amortisseur arrière est beaucoup trop dur
Elle est également bien arrêtée par le package de freins Brembo de 320 mm. Le seul vrai problème est cette suspension arrière. Car alors que la fourche Paioli est proche du OK en réglage d'origine, mais un peu bondissante sur certaines bosses à cause d'un ressort trop souple, l'extrémité arrière est de loin trop rigide, faisant basculer la moto en l'air au-dessus des pires bosses et ne fournissant pas la qualité que l'on peut attendre d'une moto de ce calibre et encore moins à ce prix. Galasso m'a dit que Paioli a simplement copié un amortisseur BMW en en concoctant une pour la Morbidelli. Mais soit ils l'ont mal fait, soit (plus probablement) la 850 V8 avait cruellement besoin d'un arrière de type Paralever. Quoiqu'il en soit, c'est le seul point négatif sur ce bijou. Ca et une zone plate entre 3000 et 4000 tours lorsque l'on ouvre en grand le V8, chose que l'on peut pourtant faire sans problème 1000 tours avant. Il est possible d'atténuer ce défaut en ouvrant partiellement l'accélérateur, mais grand ouvert, la sonorité de l'échappement se fait rugueuse avant de reprendre clairement une fois la barre des 4000 passée. Morbidelli a insisté sur le fait qu'il ne s'agissait pas de l'habituel truc italien pour passer les normes de bruit, mais un problème avec la cartographie moteur qu'ils avaient prévu de corriger, si le projet avait pu reprendre comme il l'espérait.
Conclusion
Mais ce ne fut pas le cas. Et après l'avoir piloté je peux seulement dire que le monde de la moto est plus pauvre avec cette absence. Bien qu'elle ne soit conçue que comme un produit fabriqué à la main à faible volume pour de riches clients, la Morbidelli V8 incarne l'amour italien de la fonction mécanique alliée à la forme créative. Comme une Maserati Coupé ou une Lamborghini Diablo, une Ducati 916 ou une MV Agusta F4, toutes contemporaines de cette moto magique qui marqua l'art de l'ingénierie de la fin du millénaire. Il n'est pas nécessaire d'avoir piloté le projet de vacances de Giancarlo Morbidelli pour en apprécier la technologie créative et l'engagement personnel qui ont contribué à sa réalisation, il suffit de regarder et d'admirer, puis de prendre du recul et d'écouter pendant qu'il gronde juste devant à pleine puissance et hurle vers l'horizon. La Morbidelli V8 était trop complète, trop proche de la série et surtout trop bien conçue pour être morte-née. Mais elle le fut. Che peccato !
Quel dommage que la Morbidelli 850 V8 ait été abandonné si près de la production...
Fiche technique Morbidelli 850 V8
Sur le papier (données constructeurs)
Fiche technique Morbidelli 850 V8
g2loq- Co-administrateur
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Re: Essai moto Morbidelli 850 V8
Avec des valises ça concurrencerait la Pan 1100 de la même époque
kuczynski- Membre incontournable !
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Date d'inscription : 22/10/2012
Re: Essai moto Morbidelli 850 V8
Superbe article , je ne connaissais pas cette Italienne ...
Merci pour le partage !
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Centaurdedé- Membre connaisseur...
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Re: Essai moto Morbidelli 850 V8
Je lis bien, 80 Nm de couple ?!!
ledany- Membre incontournable !
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Date d'inscription : 27/10/2014
Age : 68
Re: Essai moto Morbidelli 850 V8
,
Merci pour cet article sur une moto qui aurait pu peut-être incité Honda à nous faire une Gold 8 pattes à plat !!!
Merci pour cet article sur une moto qui aurait pu peut-être incité Honda à nous faire une Gold 8 pattes à plat !!!
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" Rien n'arrête une 15, même pas ses freins !!! "
Membre et webmaster du GWCCA
boubout51- Membre actif
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